Bulletin de psychiatrie
(parution semestrielle ou annuelle)
Ephemerides mai 2002
Actualités médicales, psychiatriques et autres manifestations
Dr Ludwig Fineltain
Neuropsychiatre
Psychanalyste
Paris

E-mail: fineltainl@yahoo.fr
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Edition du 25.05.2002
Mise à jour du 30.05.2002
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EPHEMERIDES MAI 2002
Dr Ludwig Fineltain
Ledoux 1 Ledoux 2
Barrieres et rotondes de Ledoux Barrieres et rotondes de Ledoux

   

EPHEMERIDES 2002


   Actualités scientifiques
   25.05.2002
   Nouvelle mise à jour du 30.05.2002
   

Barrière de Passy(*) Barrière des bons hommes Barrière de Longchamp Barrière de Reservoir Barrière de Chaillot(*) Barrière du Roule Barrière de Courcelle Barrière de la Croix blanche Barrière de Monceau Barrière de Clichy Barrière de la rue Royale Barrière de Montmartre Barrière de St Denis Barrière des Vertus Barrière de Bercy(*) Barrière de Fontainebleau(*) Barrière de la Rapée Barrière de Gentilly Barrière d'Enfer(*) Barrière de St Jacques Barrière du Mont Parnasse(*) Barrière de Maine(*) Barrière de Fourneaux(*) Barrière de Vaugirard(*) Barrière de Observation Barrière de l'Ecole Militaire(*) Barrière des Ministres(*) Barrière du bord de l'eau Barrière de Pantin Barrière de St Martin Barrière de Chopinette Barrière des trois Couronnes Barrière de Belleville(*) Barrière de Ménil-Montant(*) Barrière de Charonne Barrière des Rats(*) Barrière du Trône Barrière de St Mandé Barrière de Reuilly Barrière de Montreuil Barrière de Charenton(*) Barrière de Picpus

   PSYCHIATRIE A STOCKHOLM - FMC BIOTERRORISME A PARIS - CEREMONIE INTEMPORELLE A LA SORBONNE
   25.05.2002    

Les événements remarquables de mai 2002

   1) VIIème Congrès de l'Association Européenne de Psychiatrie à Stockholm.
   2) Le bioterrorisme, à l'Hôtel Mariott. Expert: Dr Garnier, le 16/05/2002.
   3) Une cérémonie à la Sorbonne en faveur de Mme Gourévitch, professeur à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, sciences historiques et philologiques.
   
   
   

Le VIIème Congrès de l'Association Européenne de Psychiatrie

    Ce congrès se tenait donc à Stockholm. Cette ville est magique. On la quitte à regret. Je me suis certes déplacé beaucoup plus pour visiter Stockholm que pour aller à toutes les conférences. Mais enfin certains thèmes avaient sollicité mon attention, en particulier les exposés sur les rapports entre la psychiatrie et la philosophie. Comme ce thème est l'une de mes marottes j'étais curieux de voir comment raisonnent nos collègues des autres pays d'Europe. Il faut savoir que c'est un thème plutôt rare et rares aussi les psychiatres qui se penchent sur cette affaire touffue.
    Le congrès cette année à Stockholm a réuni des psychiatres de l'Europe de l'Ouest et ceux des anciens états de l'Est. J'ai donc rencontré beaucoup de psychiatres russes, ukrainiens, roumains, bulgares, kosovars et bosniaques. Peu de dialogues et peu d'échanges!
    La majorité des travaux du congrès furent consacrés à la schizophrénie. C'est justice, mais cela représente malgré tout un programme quelque peu passéiste. Nous connaissons tous le développement considérable des travaux sur des pathologies subtiles et complexes comme le syndrome borderline. Il n'était pas absolument nécessaire de faire de telles concessions scientifiques dans l'unique but de faire accueil à des associations psychiatriques de l'Est malheureuses et délabrées.
    Ainsi a-t-on pu lire des posters dont le niveau était à peine celui d'un étudiant en médecine de 2ème année! Je songe à tel travail sur les troubles psychiques de diabétiques insulino-résistants, tel autre sur les toxicomanes de la région de Koursk qui se contente d'exposer une pauvre statistique!
   
    J'ai également noté parmi les prochains congrès: le congrès européen qui se tiendra à Genève, le congrès mondial qui se tiendra au Japon à YOKOHAMA (Japon) du 24 au 29 août 2002 (XIIème Congrès Mondial de Psychiatrie sur Partenariat pour la santé mentale. Renseignements: Convention Linkage, Inc., Akasaka Nihon Bldg., 9-5-24 Akasaka, Minato-ku, Tokyo 107-0052 Japan - Tél: +81-3-5770-5549 - Fax: +81-3-5770-5580 - E.mail: info@wpa2002yokohama.org - Site internet: http://wpa2002yokohama.org) et enfin celui qui se tiendra en Islande à Reykjavik, le 27ème Congrès Nordique de Psychiatrie, du 13 au 16 août 2003
   

Les conférences

    A quoi ai-je assisté?
    A la session intitulée: Psychiatrie et Philosophie des Sciences, j'ai suivi l'exposé du Dr Peter Illes de Zurich, suisse alémanique. Ce détail a son importance - vous verrez pourquoi -. Cet exposé est en effet apparemment imprégné par la philosophie de langage ou plus précisément par la philosophie analytique. Je pense que c'est une tendance très lourde dans les pays anglo-saxons mais aussi en Suisse. On y perçoit du Ludwig Wittgenstein "pur jus". Le Dr Peter Illes est préoccupé par la question de la conversion religieuse. Il a intitulé son topo: "Psychiatrie et Religion". Du changement d'opinion ordinaire à la conversion extrême (conversion signifie en effet retournement). L'orateur montre comment les textes, mêmes les textes scientifiques et le discours du psychiatre se présentent au patient comme quelque chose qu'il doit croire. Le texte saint et le texte scientifique à cet égard fonctionneraient de la même façon. L'orateur a beaucoup parlé de la psychothérapie comme étant beaucoup plus proche des sciences historiques et de la littérature que des sciences proprement dites. Il a raconté la boutade amusante de l'analysant qui dit: "Ma première analyse fut merveilleuse" - Pourquoi? - "Parce qu'elle m'a préparé à la seconde".
    Moi: L'orateur ne m'a pas vraiment convaincu. L'Ecole de Francfort nous a montré en effet l'importance de la "réfutabilité". Vous ne pouvez pas démontrer la fausseté d'une proposition du ou des textes saints alors que vous pouvez démontrer la fausseté de telle ou telle constatation clinique. Et voilà le fondement de la scientificité: la "réfutabilité". Bref je suis resté quelque peu sur ma faim.
   
   

Les exposés magistraux

    Des vedettes scientifiques de niveau international, en particulier le prix Nobel Freeman qui a fait le point sur la situation actuelle des neurosciences, ont fait salle comble.
    J'ai remarqué une conférences exceptionnelle: "Welcome and Opening Remarks", le 5.5.2002, de Allan Young MRCPsych, Professor of Psychiatry, Royal Victorian Infirmary, University of Newcastle. L'exposé était d'une remarquable intelligence. L'auteur a fait preuve de finesse, de compétence mais surtout de cette sorte d'humour que nous adorons chez nos voisins d'outre-manche.
    D'autres exposés à Stockholm de membres du Royal College furent incontestablement d'une grande richesse. Nos collègues anglais du Royal College ont manifestement, selon moi, un niveau qui les situe au dessus des normes internationales. Nous aurons besoin d'étudier de très près les cursus et le mode de formation psychiatrique britannique pour en tirer quelque leçon utile pour la France!
J'avais jadis pour la première fois remarqué l'excellence de nos collègues britanniques en 1974 quand nous avons dû mener une campagne internationale très ferme et très dure à l'encontre des crimes psychiatriques en URSS à l'Institut Serbski et dans d'autres institutions similaires. Les psychiatres anglais tels des chevaux-légers avaient pris les devants avec fougue, courage et intelligence. Ils ont su à cette époque, en particulier au moment du congrès mondial à Athènes, dans les diverses langues utiles, en anglais et en russe, exprimer en quoi consistaient le bien et le mal dans la psychiatrie contemporaine! Nous étions tous médusés devant tant de brio et d'alacrité.

    Une seule conférence décevante: un malheureux exposé de Mme le Pr Andreasen consacré aux rapports entre la pathologie psychiatrique et le génie. Ce travail, manifestement bâclé, répondait probablement beaucoup plus à une sollicitation de journaux à sensation qu'au souhait d'un cénacle scientifique.
   
    Conférence en grande salle: toujours et encore le Dr Andersson qui paraît faire la pluie et le beau temps dans l'internet psychiatrique en Scandinavie, le mardi 7.5.02 - Chairs: Charles B. Pull (Luxemburg) Nils Lindefors (Sweden)
    1) Kenneth Olausson (Sweden): "Information technology and future society"
    2) Jan-Eric Litton: "Using internet in clinical an epidemiology studies", au Karolinska Institute. Le Dr Litton est professeur des applications médicales de l'informatique. Il expose les difficultés classiques éprouvées avec le monde du papier et de l'imprimerie (Paper is difficult to reuse) par opposition au village électronique: le vieux téléphone, le mobile, internet etc.. Quelques études épidémiologiques ont été conduites grâce au "mobile diary" en 1999. L'orateur estime que le futur du WEB est le XML, extensible markup language. Il a donné en exemple la page d'accueil du site de la "Congress Libray" et du MESH. Je ne suis pas certain d'avoir saisi toutes les subtilités de cet exposé.
    3) Andersson: "Treatment of mental disorders via the internet" gerhard.Andersson@psyk.uu.se
    It's through the self-help programs. Self-help epidemiology and diagnostic systems.
    They did: headache. It could not be an alternative of the treatment; 6 weeks.
    Une étude a été publiée en 2000 sur le "tinnitus", terme qui signifie acouphènes - 30%: one-year follow-up panic disorder 500 computerized interview (WHO:s CIDI) 8% fullfilled answers: treatment feedback via email, coach encouraged
    Panic disorder II the aim to investigate specificity of the treatment - we also used the SMS
    Stress, 23 in treatment and 40 in control group, recruitment via WWW; they had a special protocol of treatment during 6 weeks
    Insomnia pain and one ongoing on depression

    Intervention personnelle. - J'ai de mon côté ainsi formulé ma réflexion: "All over the world we might tell this question: what about the teletreatment? Which kind of protocol which results? Do you think we must bring something more than self-help method through internet? This kind of therapy has not been evaluated!" Une longue discussion a fait suite. Il apparaît que les suédois estiment très vraisemblable un développement du télétraitement psychiatrique.

    4) Nils Lindefors (Sweden): "What can Internet add to psychiatry?" Eclairer ou dérouter?
    Par exemple le NIMH National Institute of Mental Health est un exemple d'outil qui peut éclairer et aider les psychiatres à parfaire la formation permanente. Un autre exemple, celui de la WHO ou World Health Organization
    Il apparaît qu'à l'avenir seuls les grands sites pourront garantir la qualité des contenus et de la formation. Autre exemple de source d'enseignement, le CME et le CPA possèdent une online. "The royal college of psychiatrist" propose un protocole d'enseignement aux professionnels. Dans le site www.rcpsych.ac.uk on peut trouver un plan de développement personnel.
    Dans le même ordre d'idée des ressources utiles se trouvent dans "Cochrane schizophrenia Group" ainsi que dans l'inévitable Medline-plus, en particulier pour l'étude des médicaments.
   
    Conférence: Personality Disorders, le 8.5.02
    L'étude nos collègues allemands est résolument centrée sur quelques trois ou quatre procédures paracliniques pertinentes:
    International Affective Picture (outil)
    Startle reflex: (Psychophysiologie paramètres EDMG) Conduction électrodermale, Heart Rate Activity
    La réflexion basée sur l'IPA (picture) et l'examen des réponses des diverses catégories de patients aux 3 ou 4 méthodes paracliniques
    Les PPD ou troubles de personnalité psychopathiques. Ce qui lui plait le plus à notre collègue c'est l'electrodermographe. Les BPD: ne montrent aucun signe particulier à l'issue des examens.
   
    Sessions consacrées à l'expertise psychiatrique.
    L'une d'elle, "Forensic Psychiatry: Subspeciality" de Peter Silfen, MD, Bar-Ilan University, Israel. L'auteur y décrit le développement considérable de cette spécialité dpuis 20 ans. La plupart de ces spécialistes préfèrent exposer les cas devant les cours de justice que de traiter les agresseurs et les criminels. La plupart des Hôpitaux Psychiatriques estiment ne pas être capables de prendre en charge ces patients particulièrement dangereux. L'auteur s'interroge à propos de la place paradoxale de la psychiatrie d'expertise. Il semble que l'autonomie de cette spécialité, qui est cependant une réalité, soit en quelque sorte contestée aussi bien par la médecine que par la psychiatrie. Pourquoi?
    Les molécules neuroleptiques de demain
    Nous avons donc eu l'occasion au congrès de nous intéresser à deux nouveaux neuroleptiques prometteurs.
    - Du nouveau chez Bristol-Myers Squibb et Otsuka Pharmaceuticals. La recherche a payé! Il est toujours émouvant d'assister à la naissance d'un nouveau neuroleptique -vous savez que les laboratoires tiennent à nommer ces molécules antipsychotiques-, l'aripiprazole, de la classe des benzisothiazolylepipérazines.
    Le laboratoire Otsuka en 2001 présentait l'aripiprazole comme un stabilisateur du système dopamine sérotonine. C'est un agoniste partiel de la dopamine D2 et des récepteur sérotoninergiques 5HT1a, un antagoniste des récepteurs 5HT2a. Elle inhibe chez l'animal l'hyperactivité dopaminergique et renforce en même temps l'hypoactivité dopaminergique. La molécule est efficiente sur les symptômes positifs et négatifs de la schizophrénie à court terme par comparaison avec le placebo.

    - Dans un autre laboratoire, chez Pfizer, le Ziprasidone ou Zeldox poursuit sa brillante carrière aux Etats-Unis mais je ne crois pas qu'il ait déjà son AMM en France.
    Le travail princeps paraît être celui de Goff, Posever, Herz, Simmons, Kletti, Lapierre, Wilner, Law et Grant, presque tous de l'Université du Massachusetts: "An Exploratory Haloperidol-Controlled Dose Finding Study of Ziprasidone in Hospitalized Patients With Schizophrenia or Schizoaffective disorder". C'est un travail considérable et très convaincant. Il montre qu'aux doses de 160 mg par jour la molécule est très efficace dans la schizophrénie.
    Dans un travail de Weiden, Iqbal, Mendelowitz, Tandon, Zimbroff et Ross intitulé "Best Clinical Practice with Ziprasidone: update after one year of experience", les auteurs décrivent la nouveauté de cette molécule destinée à concurrencer l'haldol, la clozapine, la rispéridone et l'olanzapine. Le Ziprazidone à 160 mg/jour équivaut à l'halopéridol à 15 mg/jour. Les auteurs évoquent une étude très approfondie des intervalles QTc: aucune torsade de pointes n'est apparue. On n'observe pas non plus d'augmentation pondérale. significative.
   
    Les posters
    Les posters sont toujours, dans les congrès, les espaces les plus originaux. Ceux-ci à Stockholm furent innombrables, changeant tous les jours sur les panneaux d'annonce! Voici quelques posters glanés ici et là.

    Quatre posters sur l'aripiprazole
    Plusieurs posters bien entendu ont exposé les brillants résultats des travaux effectués sur le nouveau neuroleptique, l'aripiprazole. Le premier poster de Kikushi & Burris & Jordan & McQuade décrit la molécule comme un stabilisateur du système dopamine-sérotonine. Un deuxième poster nous décrit l'aripiprazole et la rispéridone versus placebo dans la schizophrénie. Un autre poster décrit les effets neurocognitifs comparés de l'aripiprazole versus olanzapine dans les cas de psychose stable (!). Un autre poster est consacré à la méta-analyse de l'efficacité de l'aripiprazole dans la schizophrénie. Enfin un autre poster à propos d'une méta-analyse de la sécurité et de l'acceptabilité de l'aripiprazole dans la schizophrénie.
    - La comparaison des effets avec la rispéridone dans la schizophrénie et les troubles schizoaffectifs
    - Les effets comparés de l'aripiprazole et de l'halopéridol pour les mêmes pathologies.
    - L'aripiprazole est un agoniste des récepteurs D2 et 5HT1A et un antagoniste du 5HT2A.
    - Les essais se fondent sur l'échelle d'évaluation de la PANSS-total et du CGI.
   
    Trois ou quatre posters sur internet et psychiatrie: les pays scandinaves sont en avance par rapport à tous les autres pays du monde quant à l'outil internet. Ils font de l'épidémiologie, ils diagnostiquent et ils soignent à distance! Les protocoles d'étude sont rigoureux. Bien entendu ils ont vivement attiré mon attention.
    1) Is the web-administred CIDI-SF equivalent to a human SCID-interview? A l'Université d'UPSALA (Per Carlbring du Département de Psychologie, Per Forslin du Département des Neurosciences, Mimmie Willebrand, Peter Ljungstrand, Carola Strandlund, Lisa Ekselius & Gerhard Andersson). Summary: good specificity and sensivity for agoraphobia and obsessive-compulsive disorder (agreement of 75%)
    2) Telemedicine in psychiatry, Upsala Universitat Dept of Psychology Kaldo-Sandströmm Carlbring Ström Andersson, Internet based psychiatry assessment of tinnitus patients avec, pour outil d'évaluation, "a computerised internet-based version of the CID-Interview-Short Form (CIDI-SF)"
    3) Un poster de Gerhard Andersson Ph.D Associate Professor Upsala Dept Psycho Gerhard.Andersson@psyk.uu.se consacré à la télépsychiatrie
   
    Un poster consacré aux PTSD: "Long term effects of traumatic experiences in refugees after WW-II", Fischer Struva Lemke cjfischer@psychiatry.de PTSD without adequate therapy trauma related symptoms may last for more than fifty years
   
    Un poster consacré aux effets secondaires des neuroleptiques: "Antipsychotic Agents and creatinine kinase levels" de Ilya Reznik, Mester, Spivak, Kotler, Weizman, Meltzer (MD Clin. Res. Unit Ness-Ziona Mental Health Center, Israel et Divison of Psychopharmacology, Department of Psychiatry, Vanderbilt University, Nashville, TN, USA). L'élévation du taux des SCK a été observé à la faveur des traitements des neuroleptiques atypiques (clozapine, olanzapine, risperidone, haloperidol et perphénazine). Les seules élévations significatives ont été constatées avec la clozapine et la perphénazine.
   
    Vous vous demandez sans doute pourquoi ces études d'impact sont si nombreuses à la faveur des différents congrès. Les neuroleptiques classiques et atypiques ne peuvent pas se passer de travaux sur les effets secondaires indésirables parce que ceux-ci provoquent l'interruption prématurée des traitements! Mais il y a d'autres raisons plus profondes. Nous courons tous après une vérité scientifique de la pathologie mentale et des psychotropes. Cette course effrénée aujourd'hui se nomme "décennie du cerveau" ou "neurosciences". Or nous ressentons tous combien cette quête qui fut longtemps un pitoyable scientisme est vraiment devenue depuis 15 ans une véritable recherche scientifique.
   
    Plusieurs posters furent consacrés à la validité des prescriptions de neuroleptiques chez l'enfant et l'adolescent - au grand dam d'une petite association suédoise opposée aux psychotropes venue manifester devant les portes du congrès -. Le sujet est particulièrement intéressant. Voici ce qu'en disent nos collègues:
    Un poster de Findling & Fegert & De Smedt: "Risperidone in Children and Adolescents with severe disruptive behaviors and subaverage IQ" - Le terme subaverage équivaut aus gammes de la débilité profonde, moyenne et légère avec un QI de 35 à 84. Le traitement proposé: Rispéridone 0.02-0.06 mg/kg/day as a 1.0-mg/ml oral solution. Les auteurs signaleent deux cas de dyskinésie tardive réversible. Les résultats paraissent convaincants.
   
    Un poster de Faramarz Sohrabi -asmar567@yahoo.com-, Faculté de Psychologie à Téhéran. Il est consacré aux "Relations entre Personnalité et PTSD". L'auteur a étudié 144 enfants dans les suites d'un tremblement de terre. L'auteur conduit son étude à l'aide du "Junior Eysenck Personality Questionnaire", du "Child Post-Traumatic Stress Reaction Index" (que je ne connais pas) et du "Clinician-Administred PTSD Sccale"
   
    Un poster de notre excellente collègue, Mme le Dr Mireille Bonierbale, CHU Sainte Marguerite à Marseille, consacré aux "Troubles sexuels observés chez 4557 patients déprimés". Elle a effectué une étude des effets sexuels indésirables des psychotropes antidépresseurs. L'auteur a utilisé le "MADSR scale" et le "ASEX questionnaire on sexual functioning" de McGahuey. Il apparaît que le tianeptine est à cet égard dépourvue d'effets secondaires gênants. C'est un sujet d'étude d'une grande importance qui est rarement entrepris de façon aussi systématique.
   
    Un poster de Thomas Kallert (Dresden) & Schutzwohl & Matthes & Borosova (Slovakia) & Howardova (Prague) & Okine (London) & Rimaszewska (Wroclaw) sur "Structural and procedural characteristics of psychiatry day hospitals in Eastern and Western European countries". Le sujet me paraît d'une très grande importance. Les Hôpitaux de Jours représentent certainement les lieux de mémoire de la psychiatrie contemporaine. Il était donc très utile de comparer les différents modes de fonctionnement à l'Ouest et à l'Est. Il semble que les tchèques y privilégient les indications de psychothérapies, les européens de l'Est la réhabilitation des schizophrènes et les allemands les troubles affectifs. Mais en réalité l'étude n'est pas achevée. Ce type d'étude comparée me paraît prioritaire afin de contraindre "intellectuellement" l'ensemble des psychiatres européens à adopter les meilleures procédures.
    Un poster de Garlipp & Gödecke-Koch & Dietrich & Haltenhof, Départements Psychiatriques de l'Ecole de Médecine de Hanovre. On nous décrit "Les aspects psychodynamiques de la lycanthropie: relations cliniques et revue de la littérature". Les auteurs décrivent deux cas cliniques et revisitent la littérature. Il est plaisant que des collègues continuent d'étudier des concepts et des phénomènes psychiatriques qui avaient tant d'importance à l'époque du Moyen-Age.
   
   



   

AM9 Bioterrorisme
    Expert: Dr Robert Garnier

    Hôtel Mariott, le 16/05/2002

        Cette réunion scientifique a été programmée par le Dr Rapoport, président de l'AM9, Amicale des Médecins du 9ème arrondissement de Paris et parrainée par le laboratoire Pfizer. L'expert est le Dr Robert Garnier
    Le lecteur peut se demander pourquoi et comment pareil sujet peut intéresser le monde des psychiatres. La question est celle-ci: quelle est la fonction des psychiatres face au terrorisme? La pègre terroriste a réussi son forfait au-delà de ses propres espérances. Elle lance des bombes humaines dans l'espoir de détruire des vies et des immeubles mais elle déclenche en outre dans la population des paniques collectives délétères. Nous voyons dans certaines contrées des collectivités entières prêtes à se soumettre et à adorer les agresseurs dans une sorte de vaste "syndrome de Stockholm" collectif.
    Autrement dit j'estime que les plans Vigipirate et Biotox sont parfaitement insuffisants. Et pourquoi cette situation? C'est très simple: il nous manque une volonté d'autodéfense. J'estime, à titre personnel, que le Premier Ministre de l'époque et le Président de la République n'ont pas compris le ténébreux message du 11 septembre!

EXPOSE DU Dr Robert GARNIER
    Responsable du Centre Anti-poisons de l'Hôpital Fernand Widal à l'AP de Paris

    Historique.

    L'orateur rappelle qu'aux Etats Unis les stocks de fluoroquinolone en 2001 furent vite épuisés, que les Japonais en 1930 et 1940 avaient répandu des puces infestées en 1942 en Mandchourie et jadis les troupes anglaises avaient distribué des couvertures de varioleux aux Indiens d'Amérique. L'imagination n'a jamais fait défaut en temps de guerre!
    - La médiocre efficacité des armes biologiques. Les conditions d'efficacité de l'agent biologique sont difficiles à mettre en place. Comment disperser l'agent? Voie aérienne -air conditionné, pulvérisateur, voie orale (une secte américaine en 1980 a répandu des salmonelles dans les salades bars pour retarder les élections)-, voie cutanée (parapluie bulgare et ricine) etc.
    - Le classement CDC répartit les agents en catégorie A, B et C. Ces derniers sont les agents nouveaux et imprévisibles comme le seraient les nouveaux virus comme par exemple Nipah virus, Hantavirus, fièvre jaune mais aussi les BK résistants.
    - Deux agents
    L'orateur expose en priorité les agents de catégorie A et parmi ceux-ci le charbon et la variole. Le charbon: incube de 1 à 43 jours mais aussi jusqu'à 43 jours. Le traitement est la fluroroquinolone: ciproflaxine 400mg/12h. ou ofloxacine 400mg/12h. ou lévofloxacine 500mg/24h. durant 8 semaines à titre curatif mais aussi à titre préventif. La variole ayant disparu les gens ne sont pas vaccinés et les doses stockées sont en nombre insuffisants.
    Les toxines botuliques sont spectaculaires. Elles sont léthales à raison de 70 microgrammes pour un sujet de 70 kilogrammes. La secte Aum Shinrikyo a réalisé trois essais entre 1990 et 1995, le Japon a expérimenté en Mandchourie. Plus récemment les stocks accumulés en Iraq eussent suffi à intoxiquer deux fois la population mondiale. Les stocks furent en somme considérables! Les symptômes sont remarquables et mémorables. Ils résultent de l'inhibition de l'acétylcholine: asthénie, sécheresse des muqueuses, diplopie et paralysie respiratoire. Pour les formes graves en France on n'a pas de produits en quantité suffisante (anticorps antitoxines botuliques et respirateurs articifiels). On utilise certes des produits botuliniques dans les préparations médicales mais les contenus des flacons représentent seulement 1 p.1000 de la dose léthale.
   
    AGENTS CHIMIQUES
    Ils ont laissé depuis 14-18 des souvenirs effrayants: le Cl2, le COCl2, les vésicants. Notons qu'en 14-18 1300000 hommes furent gazés mais on a compté seulement 90000 décès! Les Italiens ont expérimenté en Abyssinie, les Japonais en Chine, les Allemands ont utilisé les esters phosphoriques.
    En 1980-88 vésicants et défoliants ont été utilisés durant la guerre Iran-Iraq soit sur des groupes de prisonniers soit par voie aérienne. On a également empoisonné à l'aide de thallium par voie orale.
    Ce sont: les suffoquants, les incapacitants, les vésicants, les CNH & CNH4 et les neurotoxiques:
   
    Les irritants: irritations de l'oeil
    Les incapacitants:
    - le CS = orthochlorobenzylidènemalononitrile
    - le CN = chloroacétophénone
    Il faut un lavage abondant même si ça brûle
    Les vésicants: les agents alkylants
    - Ypérite
    - Lewisite
    Les neurotoxiques sont sans doute les plus impressionnants. Les agents principaux sont des organophosphorés: le sarin, le tabun et le soman. Ils induisent une inhibition de l'acétylcholinestérase. Ils entrent également dans la composition des insecticides: sueurs, rhinorrhée, péristaltisme, bronchoconstriction, atteinte de la jonction neuromusculaire justifiant une assistance ventilatoire urgente comme ce fut le cas dans le métro de Tokyo.
   
    DISCUSSION
    La discussion a porté sur le dosage des menaces. Il m'apparaît que les dégâts psychologiques sont actuellement considérables. En marge du bioterrorisme a-t-on suffisamment réfléchi à la question suivante: les troubles psychiques induits ont été en France d'ores et déjà plus importants que les dégâts induits par le bioterrorisme lui-même. Il s'est produit un afflux de consultations aux services d'urgence, des décompensations anxieuses et dépressives et, à un degré de plus, nous aurions pu assister à des paniques collectives dans le métro etc.. La morbidité psychiatrique n'est pas suffisamment bien prise en compte par les pouvoirs publics.
    Devant le redoutable problème des paniques appelées communément "psychoses collectives" quelques progrès avaient été enregistrés à partir de 1995, à la faveur de la mise en place des CUMP ou cellules d'urgence médico-psychologique destinées avant tout à répondre aux besoins des victimes d'attentat. Les propositions du Dr Crocq, de ce point de vue, ont été précieuses.
    Il nous manque une réflexion sérieuse à propos d'un risque majeur, les paniques collectives déclenchées tout aussi bien par les attentats, les agressions collectives, les menaces vraies, les fausses menaces et les rumeurs. On pressent quelle serait la conséquence d'une peur panique déclenchée par la crainte d'une épidémie ou d'un gaz. Je suis certain que les troubles psychiques collectifs seraient aussi redoutables, sinon plus, que les atteintes physiopathologiques Sans doute ne meurt-on pas immédiatement d'une crise d'angoisse par comparaison avec les intoxications, infestations et autres pathologies. Mais est-ce bien certain?
    1) Ne serait-il pas utile de mettre en place des réseaux sentinelles psychiatriques qui soient les équivalents des réseaux d'observation des épidémies?
    2) On peut aussi se référer à ce qui a déjà été expérimenté dans d'autres pays à l'occasion des tremblements de terre comme par exemple au Japon les consignes de sécurité enseignées aux enfants.
    D'autres intervenants ont discuté du stockage et des effets des fièvres ebola, de diverses nouvelles alarmantes ici et là que personne ne peut confirmer. Les rumeurs apparaissent très vites diffusées à la faveur des périodes de tension.
   
   



   
   

Une émouvante cérémonie de remise de médaille à la Sorbonne

    Monsieur Jean BAUBEROT, Président de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes conviait à la cérémonie au cours de laquelle Monsieur Marcel LEHERPEUX recevait dans l'ordre national de la Légion d'honneur Madame Danielle Gourévitch, sa fille, ancien membre de l'Ecole Française de Rome, Directeur d'Etudes à la Section des Sciences Historiques et Philologiques, Le jeudi 23 mai 2002 à 17h00, à la Sorbonne, Péristyle
    Je ne suis pas d'ordinaire un admirateur de médailles mais cette occasion fut vraiment exceptionnelle. Nous avons assisté à une scène mémorable à la faveur de cette remise de décoration au Pr Danielle Gourévitch. La quintessence de la Sorbonne et de la psychiatrie était là, réunie dans une commune ferveur, pour le travail acharné, obstiné et modeste de Mme Danielle Gourévitch. A 24 ans elle vous eût déchiffré une pierre couverte d'inscriptions grecques dans le temps où le commun des mortels déchiffre une affiche publicitaire. En 2002, Mme Gourévitch peut se prévaloir de 140 publications qui vont de l'épigraphie grecque et latine à l'histoire des maladies dans la tradition antique. J'ai remarqué un livre consistant parmi ses derniers écrits, "Les maladies dans l'art antique" de Mirko Grmek et Danielle Gourevitch en 1999, et des articles destinés aux médecins en 2001. J'avais récemment commenté, de façon élogieuse, les articles de Mme le Professeur Danielle Gourévitch et celui de Monsieur le Dr Michel Gourévitch, psychiatre, dans le numéro spécial du cinquantenaire de la Revue du Praticien.
    Cent cinquante personnes étaient donc conviées dans les grands salons de la Sorbonne, dans ces lieux émouvants et magnifiques mais malgré tout familiers à beaucoup d'entre nous. Peu importent les discours, peu importent les congratulations! J'ai vu ce jour là sous le dôme du péristyle une famille résumant à elle seule la France éternelle, la France des grandes âmes, celle dont on peut légitimement être fier. Dans cette famille issue de la province la promotion républicaine a produit des universitaires, des savants, des grammairiens et des commerçants. L'Ecole Normale représentait une voie privilégiée de la grande tradition républicaine pure et dure vers quoi beaucoup de familles ont dirigé leur regard. Danielle Gourévitch s'y est engouffrée accédant ensuite à l'Ecole de Rome puis à l'Ecole des Hautes Etudes. Mme Gourevitch a fait devant moi l'éloge de l'Université de Princeton qui l'a invitée à donner un enseignement. Il apparaît que là bas tout est mis à disposition du chercheur pour faciliter son travail. Je me disais in petto: c'est Princeton qui doit remercier la vieille Europe, et Paris en particulier, de lui prêter des esprits aussi brillants que Mme Gourévitch!
    Autour de Mme Danielle Gourevitch se pressaient donc des amis psychiatres comme le Pr Koupernik et le Pr Postel, que je n'avais pas revu depuis des mois, des professeurs de grammaire, de français et de lettres classiques, des chercheurs en épigraphie grecque et des historiens de la médecine. Les élèves de Mme Gourévitch étaient venus assister leur enseignante en grand nombre. Je voudrais seulement que le lecteur se reporte à l'un des derniers articles, celui qui figure dans le numéro spécial de la revue du Praticien de novembre 2001. Elle y invitait le médecin à redevenir "un maître à penser" et continuait ainsi de développer sa réflexion: "Cette médecine technique et déshumanisée n'a pas de passé (d'où des "affaires" souvent sans précédent, comme celle du sang contaminé), pas de langue culturelle (d'où l'anglais médical et le conformisme rédactionnel), pas de philosophie (d'où les "comités d'éthique"), pas même de livre: combien de jeunes docteurs n'ont parcouru que des cours polycopiés? Une seule espérance à nos yeux, le rééquilibrage des matières scientifiques par des enseignements littéraires. Mais quelle méthode pour cette histoire de la médecine? Pour ne pas être une simple toge vaguement élégante dans laquelle se draper, mais pour être au contraire véritablement utile à la pratique quotidienne du médecin, la meilleure histoire de la médecine sera, à notre avis, philologique au sens noble d'étude intime et approfondie des textes - antiques, modernes et même contemporains, en français et dans les langues étrangères, anciennes et vivantes -; elle enseignera à bien lire, à aller au fond des choses dans la compréhension du passé, plus ou moins ancien."
    Je ne sais que dire après ces lignes, voyez-vous, cher lecteur, puisque tout y est dit !
   

Dr Ludwig Fineltain Neuropsychiatre Psychanalyste Directeur du Bulletin de psychiatrie
   fineltainl@yahoo.fr



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